RM2AG5J0D–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. m TROIS jours plus tard Maria entendit en ouvrantla porte au matin un son qui la figea quelquesinstants sur place, immobile, prêtant loreille.Cétait un mugissement lointain et continu, le ton-nerre des grandes chutes qui étaient restées glacées etmuettes tout lhiver. — La glace descend, dit-elle en rentrant. Onentend les chutes. Alors ils se mirent tous à parler une fois de plusde la saison qui souvrait et des travaux qui allaientdevenir possibles. Mai amenait une alternance de pluieschaudes et de beaux jours ensoleillés qui triomphait 39 peu à p
RM2AG5A1N–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. nt parlé clairement et elle sentait quil fallaitobéir. Le souvenir de ses autres devoirs ne vintquensuite, après quelle se fût résignée, avec un soupir.Aima-Rose était encore toute petite ; sa mère étaitmorte et il fallait bien quil restât une femme à lamaison. Mais en vérité cétaient les voix qui lui avaientenseigné son chemin. La pluie crépitait sur les bardeaux du toit, et lanature heureuse de voir lhiver fini envoyait par lafenêtre ouverte de petites bouffées de brise tiède quisemblaient des soupirs daise. A travers les heures de lanuit Maria
RM2AG59TE–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. XVI EN mai, Esdras et DaBé descendirent des chan-tiers et leur chagrin raviva le chagrin des autres.Mais la terre enfin nue attendait la semence,et aucun deuil ne pouvait dispenser du labeur delété. Eutrope Gagnon vint veiller un soir, et peut-être,en regardant à la dérobée le visage de Maria, devina-t-il que son cœur avait changé, car lorsquils se trou-vèrent seuls il demanda : — Calculez-vous toujours de vous en aller,Maria ? Elle fit : « Non » de la tête, les yeux à terre. 239 — Alors... Je sais bien que ça nest pas le tempsde parler de ça, ma
RM2AG5D9Y–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. pie ou de quelque autreaction apparemment malhonnête et défendue. 130 Ils arrivèrent chez eux comme la nuit tombait.Le soir n avait été quun lent évanouissement de lalumière ; car depuis le matin le ciel était demeuré griset le soleil invisible. De la tristesse pesait sur le sollivide ; les sapins et les cyprès n avaient pas Tair darbresvivants, et les bouleaux dénudés semblaient douter duprintemps. Maria sortit du traîneau en frissonnant etnaccorda quune attention distraite aux jappements deChien, à ses gambades, aux cris des enfants qui lappe-l
RM2AG5E30–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. lèvres : «Je vous salue, Marie, pleine de grâce... » Aviez-vous douté delle, mère du Galiléen ? Parcequelle vous avait huit jours auparavant supplié parmille fois et que vous naviez répondu à sa prièrequen vous figeant dans une immobilité vraimentdivine pendant que saccomplissait le destin, pensiez-vous quelle allait, elle, douter ou de votre pouvoir oude votre bonté ? Ceût été mal la connaître. Commeelle vous avait demandé votre protection pour unhomme, voici quelle vous demande votre pardonpour une âme, avec les mêmes mots, la même humi-lité, l
RM2AG5FR7–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. sous un ciel clair, sans éclat, au tempsoù les feuilles des bouleaux et des trembles commen-cent à jaunir. La récolte du grain fut médiocre : mais les foinsavaient été beaux, de sorte que Tannée dans son ensemblene méritait m transports de joie m doléances. Et pour-tant, les Chapdelaine ne cessèrent de déplorer longtempsencore, dans leurs conversations du soir, et la sécheresse loi sans précédent daoût, et les gelées sans précédent deseptembre, qui avaient trahi leurs espoirs. Contre lava-rice du trop court été et les autres rigueurs dun climatsa
RM2AG5MDG–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. %? *•?• it^---^-. BOIS ORIGINAUX de GERARD COCHETLA RENAISSANCE DU LIVRE MCMXXII MARIA CHAPDELAINE v> *«? IL A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE : .ih ^ Dix exemplaires (i à lo) sur papier vieux japon à la forme,avec double suite des bois en noir et en couleur.Vingt-cinq exemplaires sur japon impérial ( 11 à 3 5 )•Hl* •»!!? ^ avec suite des bois en noir. ?«??{}??{{?Cent vingt exemplaires sur hollande Van Gelder (36 à 155).Mille exemplaires sur papier vélin pur fil Lafuma ( i > 6à 1155), tous numérotés, plus quelques exemplaires de•KK *!K collaborate
RM2AG597N–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. * *iK POUR +!<? *!i* *i!* LA RENAISSANCE DU LIVRE L. HÉMON Ghapdelaifie La Renaissance du Livre PARIS. ù^ Z <f!:)
RM2AG5HMK–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. evint sagenouiller à côté des autres. « Grand saint Joseph, priez pour nous... »« Saint Isidore, priez pour nous... »En se déshabillant, la prière finie, la mère Chapde-laine soupira dun air de contentement : — Que cest donc plaisant de recevoir de la visite,alors quon ne voit presque quEutrope Gagnon dun 47 bout de Tannée à lautre. Voilà ce que cest que derester si loin dans le bois... Du temps que jétais fille,à Saint-Gédéon, la maison était pleine de veilleux qua-siment tous les samedis soirs et tous les dimanches :Adélard Saint-Onge, qui ma c
RM2AG5E15–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. XI UN soir de février le père Chapdelaine dit :— Les chemins sont beaux. Si tu veux.Maria, nous irons à la Pipe, dimanche, pourla messe. — Cest correct, « son » père.Mais elle avait répondu cela dun ton lassé,presque indifférent, et ses parents échangèrent unregard furtif par-dessus sa tête. Les paysans ne meurent point des chagrinsdamour, ni nen restent marqués tragiquement toutela vie. Ils sont trop près de la nature, et perçoiventtrop clairement la hiérarchie essentielle des choses qui 143 comptent. Cest pour cela peut-être quils évitent leplu
RM2AG5K1G–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. II LHEURE du souper était venue que Maria navaitpas encore fini de répondre aux questions, deraconter, sans en omettre aucun, les incidentsde son voyage, de donner les nouvelles de Saint-Primeet de Péribonka, et toutes les autres nouvelles quellesavait pu recueillir au cours du chemin. TitBé, assis sur une chaise, en face de sa sœur,fumait pipe sur pipe sans détourner les yeux delle uneseconde, craignant de laisser échapper quelque révéla-tion importante quelle aurait tue jusque-là. La petiteAima-Rose, debout près delle, la tenait par le cou ;Tél
RM2AG5BWG–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. rtaitcomme un présent magnifique un monde éblouissant,la magie des villes; il la délivrerait de laccablementde la campagne glacée et des bois sombres... Elle ne pouvait se résoudre encore à se dire : « Jevais épouser Lorenzo Surprenant. » Mais en vérité sonchoix était fait. Le norouâ meurtrier qui avait ense-veli François Paradis sous la neige, au pied de quelquecyprès mélancolique, avait fait sentir à Maria dumême coup toute la tristesse et la dureté du pays quellehabitait et lui avait inspiré la haine des hivers duNord, du froid, du sol blanc,
RM2AG5M16–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. ??{{?Cent vingt exemplaires sur hollande Van Gelder (36 à 155).Mille exemplaires sur papier vélin pur fil Lafuma ( i > 6à 1155), tous numérotés, plus quelques exemplaires de•KK *!K collaborateurs, hors commerce (H. C). +fi* *s+ EXEMPLAIRE W 5 C 2. LOUIS HEMON M C ARIA ^HAPDELAÏNE RÉCIT DU CANADA FRANÇAIS ^M ^^mr ^ft ^^ ^9 9 ^ ^B i 1 i ^Ê ^JHË. ?31^^^| BOIS ORIGINAUX de GERARD COCHETLA RENAISSANCE DU LIVRE MCMXXII
RM2AG58MB–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. ^, ^•^
RM2AG5AFX–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. demeurait àSaint-André-de-rÉpouvante ; Racicot, de Honfleur,parlait souvent de son fils, qui était chauffeur à borddun bateau du Golfe, et chaque fois cétaient encoredes noms nouveaux qui venaient sajouter aux anciens :les noms de villages de pêcheurs ou de petits ports duSaint-Laurent, dispersés sur les rives entre lesquellesles navires dautrefois étaient montés bravement verslinconnu... Pointe-Mille-Vaches... les Escoumains...Notre-Dame-du-Portage... les Grandes-Bergeronnes...Gaspé... Quil était plaisant dentendre prononcer cesnoms, lorsquon pa
RM2AG5CJB–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. dernière supposition par peur dun refusdéfinitif. — Vous navez pas besoin de dire oui de suite,bien sûr ! Il ny a guère longtemps que vous me con-naissez... Seulement pensez à ce que je vous ai dit. Jereviendrai, Maria. Cest un grand voyage, et qui coûtecher; mais je reviendrai. Et si vous pensez assez, vousverrez quil ny a pas un garçon dans le pays avec quivous pourriez faire un règne comme vous ferez avec moi,parce que si vous me mariez nous vivrons comme dumonde, au lieu de nous tuer à soigner des animauxet à gratter la terre dans des places
RM2AG5KB8–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. LOUIS HEMON M C ARIA ^HAPDELAÏNE RÉCIT DU CANADA FRANÇAIS ^M ^^mr ^ft ^^ ^9 9 ^ ^B i 1 i ^Ê ^JHË. ?31^^^| BOIS ORIGINAUX de GERARD COCHETLA RENAISSANCE DU LIVRE MCMXXII. I TE MISSA EST. La porte de Téglise de Péribonka souvrit et leshommes commencèrent à sortir. Un mstant plus tôt elle avait paru désolée, cetteéglise, juchée au bord du chemin sur la berge hauteau-dessus de la rivière Péribonka, dont la nappeglacée et couverte de neige était toute pareille à uneplaine. La neige gisait épaisse sur le chemin aussi, etsur les champs, car le soleil da
RM2AG5HCH–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. IV A VEC juin le vrai printemps vint brusquement,/ après quelques jours froids. Le soleil brutal1 chauffa la terre et les bois, les dernièresplaques de neige sévanouirent, même à lombre desarbres serrés ; la rivière Péribonka grimpa peu à peule long de ses hautes berges rocheuses et vint noyerles buissons daunes et les racines des premières épi-nettes; une boue prodigieuse empht les chemins. Laterre canadienne se débarrassa des derniers vestiges delhiver avec une sorte de rudesse hâtive, comme parcrainte de lautre hiver qui venait déjà. Esdras
RM2AG5ARN–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. urrure, la toque poudrée de neigequi lui descendait jusquaux yeux, et sen alla vers lelit de la malade sans perdre une seconde, comme unmessager porteur dune grâce. Oh ! la certitude ! le contentement dune promesseauguste qui dissipe le brouillard redoutable de la mort!Pendant que le prêtre accomplissait les gestes consacréset que son murmure se mêlait aux soupirs de la mou-rante, Samuel Chapdelaine et ses enfants priaient sansrelever la tête, presque consolés, exempts de doute etdinquiétude, sûrs que ce qui se passait là était unpacte conclu ave
RM2AG5H3K–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. nse et il se met chaud,des fois... Mais cest fini. « Et cest vrai aussi que je sacrais un peu. A vivre toutle temps avec des hommes « rough » dans le bois ousur les rivières, on saccoutume à ça. Il y a eu un temps 83 que je sacrais pas mal, et M. le curé Tremblay madisputé une fois parce que javais dit devant lui que jenavais pas peur du diable. Mais cest fini. Maria. Jevais travailler tout lété à deux piastres et demie par jouret je mettrai de largent de côté, certain. Et à lau-tomne je suis sûr de trouver une « job » commeforeman dans un chanti
RM2AG5G8T–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. e mariage, et puis une longue suite dannées presquesemblables aux précédentes, dans une autre maison.Cest comme cela quon vit, a dit la voix. Ce nestpas bien terrible et en tout cas il faut sy soumettre ;mais cest uni, terne et froid comme un champ àlautomne. Ce nest pas vrai, tout cela. Maria secoue la têtedans lombre avec un sourire inconscient dextase, etsonge que ce nétait pas vrai. Lorsquelle songe à FrançoisParadis, à son aspect, à sa présence, à ce quils sont etseront lun pour lautre, elle et lui, quelque chose fris-sonne et brûle tout à l
RM2AG5C6W–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. son et dela terre, de jeunes hommes lui demandaient à lépou-ser. Et il fallait quelle dît : « oui » à celui-là, « non »à lautre... Si François Paradis ne sétait pas écarté sansretour dans les grands bois désolés, tout eût été facile.Elle naurait pas eu à se demander ce quil lui fallaitfaire : elle serait allée droit vers lui, poussée par uneforce impérieuse et sage, aussi sûre de bien faire quuneenfant qui obéit. Mais il était parti ; il ne reviendraitpas comme il lavait promis, ni au printemps, ni plustard, et M. le curé de Saint-Henri avait déf
RM2AG5CCY–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. XIII PERSONNE ne posa de questions à Maria, ni cesoir-là ni les soirs suivants ; mais quelquemembre de la famille dut parler à EutropeGagnon de la visite de Lorenzo Surprenant et de sesintentions évidentes, car le dimanche daprès Eutropevint à son tour, après le repas de midi, et Mariaentendit un deuxième aveu damour. François Paradis était venu au cœur de lété, des-cendant du pays mystérieux situé « en haut des ri-vières » ; le souvenir des très simples paroles quilavait prononcées était tout mêlé à celui du grand soleiléclatant, des bleuets mûr
RM2AG5FFC–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. VIII UN matin doctobre, Maria vit en se levant lapremière neige descendre du ciel en innom-brables flocons paresseux. Le sol était blanc, lesarbres poudrés, et il semblait que lautomne fut déjàfini, au temps où il ne fait que commencer ailleurs. Mais Edwige| Légaré prononça dun air senten-cieux : — Après la première neige on a encore un moisavant ITiivernement. Jai toujours entendu les vieuxdire ça, et je pense de même. Il avait raison; car deux jours plus tard une pluiefit fondre la neige et la terre se montra de nouveau. 103 Pourtant Tavertisse
RM2AG5B98–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. il révélait un changementsubtil, quelque signe nouveau qui faisait de cettefemme couchée, aveuglée et gémissante, une créaturetoute différente de leur femme et de leur mère quilsavaient connue si longtemps. Une demi-heure passa : le père Chapdelaine seleva brusquement, après un nouveau regard vers lafenêtre. — Je vas atteler, dit-il.TitSèbe hocha la tête. — Cest correct : vous ferez aussi bien datteler ;le jour va venir. De même M. le curé sera icitte pourmidi. — Oui, je vas atteler, répéta le père Chapdelaine.Mais au moment de partir il semblait
RM2AG5K85–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. les bois. Celui-là nétaitguère plus quune piste rudimentaire encore encombréede racines, et qui décrivait de petites courbes opportu-ne nistes pour éviter les roches ou les souches. Il grimpaune montée, serpenta sur un plateau au milieu du boisbrûlé, laissant parfois un aperçu sur la descente du flancabrupt, les masses de pierre du rapide, le versant opposéqui devenait plus haut et plus escarpé au-dessus de lachute, puis rentrant dans la désolation des arbrescouchés à terre et des chicots noircis. Des coteaux de pierre, une fois contournés, sem-b
RM2AG5GXY–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. ensemble dans lebois ; il marche à côté delle sans la toucher ni rienlui dire, à travers le bois de charme qui commence àse couvrir de fleurs roses, et rien que le voisinage estassez pour leur mettre à tous deux un peu de fièvreaux tempes et leur pincer le cœur. Maintenant ils se sont assis sur un arbre tombé,et voici quil parle. ?— Vous êtes-vous ennuyée de moi. Maria ? Cest assurément cela quil demandera dabord;mais elle ne peut pas aller plus loin dans son rêve, parceque lorsquelle est arrivée là une détresse larrête. Oh !mon Dou ! Comme elle
RM2AG5E94–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. .. Assurément son souhait se rap-portait à François Paradis. Vous laviez deviné, Marie,pleine de grâce? Que pouvait-elle énoncer de ses dé-sirs sans profanation? Quil nait pas de misère dans lebois... Quil tienne ses promesses et abandonne desacrer et de boire... Quil revienne au printemps. Quil revienne au printemps... Elle sarrête là, parcequ il lui semble que lorsquil sera revenu, ayant tenuses promesses, le reste de leur bonheur qui vient seraquelque chose quils pourront accomplir presque seuls...presque seuls... A moins que ce ne soit un sac
RM2AG5G1E–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. 13. VII SEPTEMBRE arriva, et la sécheresse bienvenue dutemps des foins persista et devint une catastrophe.A en croire les Chapdelaine il ny avait jamaiseu de sécheresse comme celle-là, et chaque jour quel-que raison nouvelle était suggérée, qui expliquait lasévérité divme. Lavoine et le blé jaunirent avant davoir atteintleur croissance; le soleil incessant brûla lherbe et lesregains de trèfle, et du matin au soir les vaches affa-mées beuglèrent, la tête appuyée sur les clôtures. Ilfallut les surveiller sans répit, car même les maigrescéréales enc
RM2AG5JN1–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. sagesse. Il fumait et causait avec les hommes maintenant,de par ses quatorze ans, ses larges épaules et sa con-naissance des choses de la terre. Huit ans plus tôt ilavait commencé à soigner les animaux et à rentrerchaque jour dans la maison sur son petit traîneau laprovision de bois nécessaire. Un peu plus tard il avaitappris à crier très fort : « Heulle ! HeuUe ! » derrièreles vaches aux croupes maigres, et « Hue! Dia ! » et« Harrié ! » derrière les chevaux au labour, à tenir lafourche à foin et à bâtir les clôtures de pieux. Depuisdeux ans déjà
RM2AG5D3K–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. XII COMME mars venait, TitBé rapporta un jourde Honfleur la nouvelle quil y aurait le soir,chez Ephrem Surprenant, une grande veilléeà laquelle ils étaient tous priés. Il fallait que quelquun restât pour garder lamaison, et comme la mère Chapdelaine émit ledésir de faire le voyage pour se distraire un peu,après ces longs mois de réclusion, ce fut TitBé quiresta. Honfleur, le village le plus proche de leur mai-son, était à huit milles de distance; mais quétaienthuit milles à faire en traîneau sur la neige à traversles bois, comparés au plaisir den
RM2AG59HM–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. XVI EN mai, Esdras et DaBé descendirent des chan-tiers et leur chagrin raviva le chagrin des autres.Mais la terre enfin nue attendait la semence,et aucun deuil ne pouvait dispenser du labeur delété. Eutrope Gagnon vint veiller un soir, et peut-être,en regardant à la dérobée le visage de Maria, devina-t-il que son cœur avait changé, car lorsquils se trou-vèrent seuls il demanda : — Calculez-vous toujours de vous en aller,Maria ? Elle fit : « Non » de la tête, les yeux à terre. 239 — Alors... Je sais bien que ça nest pas le tempsde parler de ça, ma
RM2AG5EJK–. Maria Chapdelaine : récit du Canada français. autres dormaient encore ; seul, Chienavait quitté sa place près du poêle en la voyant remueret était venu saccroupir près du lit, solennel, la têteposée sur les couvertures. Les regards de Maria se pro-menaient sur le long museau blanc appuyé sur lalaine brune, sur les yeux humides où se lisait la sim-plicité pathétique des animaux, sur les oreilles tombantesau poil lisse, pendant que ses lèvres murmuraient sansfin les paroles sacrées : « je vous salue, Marie, pleinede grâce... » Bientôt TitBé sauta à bas de son lit pour mettredu bois dans le poê
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